Le cassoulet de Castelnaudary

Pour une fois, nous allons quitter notre petit coin de Bretagne, et nous intéresser aux origines du cassoulet, nec plus ultra des mets de l’Olympe, bien supérieur à la mythique ambroisie à la réputation surfaite.

 

Nous voilà donc en pleine guerre de 100 ans.

Les anglais (commandés localement par le Prince Noir de sinistre mémoire, fils d’Edouard III roi de la perfide Albion) nous taillaient des croupières, et faisaient le siège de la bonne cité de Castelnaudary.

 

Nos valeureux chauriens se défendaient au mieux, mais la baisse des réserves alimentaires et les assauts répétés de ces pignoufs de rosbeefs commençaient à leur grignoter le moral. Le commandant en chef voyant le désastre prochain inévitable, convia ses lieutenants à un apéro dinatoire, et de concert, ils cherchèrent une éventuelle solution.

 

Les propositions en étaient venues à “finir avec honneur”, “gloire posthume”, et autres preuves d’optimisme notoire, quand une voix proposa timidement : 

 

- Et si nous demandions à  Abracadabra le vieux druide local ? Il n’est plus très frais, mais peut-être que dans un vieux grimoire, et sur un malentendu…

 

N’ayant plus rien à perdre, une délégation se rendit auprès de l'ancêtre et lui fit part de la situation catastrophique dans laquelle se trouvait la cité.

Le pauvre vieux, affalé dans son fauteuil, semblait ne rien entendre, mais ouvrit un œil, puis l’autre, se leva péniblement, tout flageolant, puis se grattant avec componction énergiquement l'entrejambe lança :

 

- Bien ! Que l’on allume un bon feu, que l’on m’apporte une grande marmite, et tout ce qu'il vous reste de comestible ! Fissa !

 

Chacun fournit ce qu’il avait, et tout ce qui était consommable se trouva bientôt près du druide et de sa marmite.

D’un air pénétré, l’homme de l’art plaça les produits un à un dans le récipient, non sans marmonner quelques formules cabalistiques propres à potentialiser le pouvoir magique de la mixture.

 

Quelques heures plus tard, les spectateurs, d’abord dubitatifs quant à l’efficacité du mélange, furent enthousiasmés par le fumet se dégageant de la préparation. Les yeux luisaient, les larmes perlaient, la salive suintait aux commissures, des tonneaux de Cahors et Buzet étaient mis en perce. Tous étaient impatients de tester les effets magiques de la préparation.

 

La médication absorbée, nos braves chauriens chauffés à blanc, persuadés avoir englouti une potion magique ouvrirent les portes de la ville, et se ruèrent vers les lignes ennemies en hurlant à tue-tête. Voyant cela, de surprise les anglois honnis, craignant probablement quelque diablerie de la part des assiégés, s’éparpillèrent comme vol d’étourneaux au son du canon à carbure.

 

Les habitants enfin libérés purent alors faire leurs emplettes au Lidl local (le vrai prix des bonnes choses), afin de reconstituer leurs réserves.

Pour le lendemain, ils avaient tous récupéré une portion dans la marmite, et réservée dans une cassole. Ils purent ainsi constater, que le cassoulet c'est encore meilleur réchauffé. Il faut laisser le temps "au gras" de bien imprégner les lingots.

 

Ainsi est né ce sommet de la gastronomie française. Pourquoi croyez-vous que le 4ème régiment de Légion Étrangère se soit installé à Castelnaudary ? C’est pas une preuve ça ?

 

Mais attention, car ce plat de légende ne supporte ni la médiocrité, ni la revisite hasardeuse !

Ainsi, certains osent y adjoindre des viandes fumées ou même de la tomate, pure vilénie ! Alors qu’à l’époque ce fruit américain était encore inconnu de nos potagers ; Christophe Colomb ne s’étant pas encore fourvoyé en Amérique. Dans le Lauragais, dès le plus jeune âge, il est bien inculqué aux enfants, à l’école, à la veillée au cathé, que la tomate annihile irrémédiablement les vertus magiques de ce plat mirifique.

 

Qu'on se le dise !!!