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DGLA

ou Dégénérescence Généralisée Liée à l' Âge.

 

Et oui, à l’instar d’Alphonse Allais, j’avais l’intention de vivre éternellement ou du moins de faire “comme si”, et tout se déroulait comme prévu.

Malheureusement, une suite de petits désagréments m’a ramené à une plus juste vision des choses.

 

Tout a commencé par une petite gêne lombaire sous la douche matutinale. Vous savez, ce point douloureux qui vous incite à l’économie de mouvements. Mais malgré des efforts mesurés (et chacun sait que je suis expert en la matière), la douleur va croissante jusqu’au coucher.

Le lendemain au réveil, plus rien ! Pas la moindre raideur. Mais au fil du temps, le scénario de la veille se réinstalle…

 

Puis, le jour suivant, un aller et retour à Nantes, prévus de longue date. Au coucher, peut-être mû par un sombre pressentiment, je prends la précaution de garder à portée de main, une carafe d’eau, un paquet de Granola, et l'ustensil indispensable au marin d’un certain âge en croisière : l’urinoire.

 

Aux premières lueurs de l’aube, impossible de me lever, et même au repos, une douleur lancinante me taraude le bas du dos. Appel au disciple d'Hippocrate local : jour de repos.

Je passe une journée difficile, materné par mon complice de randonnée kercadoïen de passage entre deux couches d’antifouling.

 

Après une nuit éprouvante, téléphone :

- Le médecin passera en début d’après-midi, me répond la secrétaire du médecin.

 

J’accueille enfin l’homme de l’art qui me prescrit un cocktail antalgique, constitué d'un anti-inflammatoire et de morphine.

Efficace : une demi-heure après la prise des louzous, plus de douleur au repos, et le lendemain, après quelques contorsions, debout. Génial !

 

Je vois la vie en rose, le soleil brille, les petits oiseaux gazouillent… Mes malheurs ne seront bientôt plus qu’un mauvais souvenir… 

 

Oui…mais non. Ce n’est que la mi-temps…

Bientôt, une gêne persistante m’envahit le bas-ventre. Bof ! un petit laxatif et ça fera la rue Michel !

Las ! Après usage de ma pharmacie personnelle et de celles de mes voisins, rien n’y fait et la douleur s’installe, me reclouant au lit.

 

Le 15 !

- Lavement m’est-il prescrit, mais si possible avec le concours d’une infirmière !?

 

Vous vous doutez bien que l’aventure ne s’arrête pas là. Un ami passant par là, voyant ma mine déconfite, essaie de me déposer aux urgences d’Auray : 

- A Vannes, nous est-il intimé.

 

A la perspective de passer plusieurs heures sur un brancard dans les couloirs de l’hôpital, je préfère bêtement rentrer à la maison, mais quelque temps après, une voisine devant ma mine défaite, me convainc de tenter l’expérience des urgences, et nous voilà partis à SOS médecins, puis à l'hôpital. 

 

Et là, surprise : quelques papiers et hop, direction un box de soins devant une rangée de pauvres hères attendant “patiemment” leur tour. La crainte d’une perforation je suppose.

 

Le médecin, après examen, décide qu’il faut désobstruer le conduit afin de libérer tout à la fois mon transit et la place pour les suivants. S’ensuivent quelques lavements pratiqués par des professionnel.le.s, qui aboutissent enfin à une libération tonitruante.

De retour dans le box, fracassé mais fier d’annoncer la bonne nouvelle, je vois que dans l’attente d’un éventuel nouveau résultat négatif, ils avaient préparé subrepticement la solution finale : une énorme poche remplie d’un liquide accrochée à une potence, un tuyau, une canule. La salle des tortures, je suis prêt à tout avouer !

Devant ma mine déconfite, il m’est répondu : 

- Faut pas perdre ! Et puis après vous serez tout propre dedans ! Et puis vous rentrerez chez vous ! Téléphonez qu’on vienne vous chercher.

- Comme vous n’avez plus rien à vous mettre, on va vous passer une tenue en papier et une couche-confiance. 

- Sortez vous changer dans les toilettes… Au revoir… Au suivant !

 

C’est ainsi que je me suis retrouvé grelottant sur le trottoir devant l'hôpital, à 22 heures à attendre Danielle, mon adorable et dévouée voisine. Le voyage du retour se fit fenêtres béantes, dans l’attente d’une douche réparatrice.

 

Après réflexion, compte tenu des dégradations dûes à l’usure des corps, et qu’il me semble vain de pouvoir “réparer des ans l’irréparable outrage”, je ne me sens plus de vivre éternellement, surtout vers la fin.

 

 

 

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Commentaires: 7
  • #1

    PBories (mardi, 06 juin 2023 10:37)

    L’histoire se termine bie n et c’est là l’essentiel ! Deux observations :
    - la morphine , si elle soulage efficacement la douleur , paralyse tout aussi efficacement le transit !
    -les urgences de Vannes ont été diligentes ce que je n’ai pas eu l’occasion de constater à deux reprises ……… probablement en phase d’amélioration !

  • #2

    Tonton (mardi, 06 juin 2023 10:48)

    Je savais que mon transit risquait de pâtir du traitement morphinique (à peine 2 jours), cependant la sensation euphorique de libération provoqué par le soulagement, peut sans doute expliquer cette négligence.

  • #3

    Michel (mardi, 06 juin 2023 10:52)

    Tu vois toton fallait y aller malgré tes appréhensions.
    Tout est bien qui fini bien comme dans un bon film !

  • #4

    Joël du bout du bout (mardi, 06 juin 2023 11:30)

    Ton texte est tellement bien tourné que j'hésite encore à le classer, soit dans les enquêtes policières , soit dans les oeuvres romantiques ....

  • #5

    Mr Descamps, c'est à vous (mardi, 06 juin 2023 11:42)

    De l'Enfer au Paradis, vive la coloscopie!
    Puisque nous sommes définitivement entré dans la famille des Tamalou, voici mon histoire qui se termine au Paradis...:
    - Intestins bloqués, douleur dans le bas ventre, Monsieur il faut faire un coloscopie!
    - Ah?
    Je passe les détails préliminaires que nous avons tous connus et qui vous mettent à la merci du moindre faut mouvement à la porte de l'enfer WCesque.
    A la clinique une charmante hôtesse en blanc vous fait remplir des papiers...humpf! où? puift! s'cuse!, voilà voilà.....Salle d'attente!!!!
    Enfin une non moins charmante infirmière , en rose, m'introduit (.) dans une petite salle en m'offrant une jolie nuisette en papier; attendez-là monsieur on va venir...
    ....
    ....
    Ca y est! Un jeune homme tout couvert de bleu ciel tel Charon m'emmène sur mon brancard à travers les dédales de l'hôpital et m'amène directe au purgatoire (du verbe purger?):
    Une grande salle dans la pénombre avec trois personnes tous en bleu marine, devants leurs écrans et des appareils partout...
    Puis vient le grand patron, tout en blanc , lui:
    - tout le monde est prêt?
    - Monsieur Descamps, comptez jusqu'à 10
    - un, deux trois, qu...
    ...
    - Doucement, Monsieur Descamps, me dit une très charmante jeune femme toute de violette vétue...
    - Euh, j'ai dormi?
    - quatre heures me dit elle et tout va bien, vous n'avez rien!
    derrière elle, une vaste fenêtre donnant sur le Paradis provençal...


  • #6

    Tonton (mardi, 06 juin 2023 15:20)

    Deux commentaires à l'adresse d'Olivier :
    - Je ne pense pas que Charon ait un costume bleu ciel pour faire passer le Styx. Mais avais-tu pensé à te munir de ton obole sous la langue ? Sinon, 100 ans à errer sur les bords du fleuve des enfers !
    - Quatre heures pour compter jusqu'à 10, même à l'aune actuelle de l'Education Nationale, c'est pas terrible ! As-tu révisé depuis ?

  • #7

    Agnès (vendredi, 09 juin 2023 07:50)

    En fait, au départ, tu as fait une crise de colique néphrétique?????